Décrivez votre métier avec des détails sur vos produits, services, expertise et savoir faire
La conservation – restauration de tableaux a pour but de stopper l’évolution des altérations subies par les œuvres d’art au fil du temps et de permettre ainsi leur transmission aux générations futures.
Ce métier obéit à une déontologie internationale selon les normes conformes au métier de conservateur restaurateur inscrite dans le code ECCO (1993) à savoir la stabilité des matériaux d’origine et rapportés, leur réversibilité et enfin, la lisibilité de l’œuvre. Selon Cesare Brandi, « la restauration représente le moment méthodologique de la reconnaissance de l’œuvre d’art, dans sa consistance physique et sa double polarité esthétique et historique, en vue de sa transmission aux générations futures (…) elle doit viser à rétablir l’unité potentielle de l’œuvre d’art (…) sans effacer la moindre trace du passage de l’œuvre d’art dans le temps. »
La conservation-restauration se subdivise en plusieurs étapes.
- La restauration curative : stopper en urgence la poursuite de dégradation par exemples traiter une œuvre contre les moisissures, poser une protection temporaire sur la couche picturale en vue d’un transport afin d’éviter de perdre de la matière originelle, etc.
- La restauration conservative : consolider le support toile (doublage, rentoilage) ou reprise de déchirures (incrustation de toile et ou fil à fil) ou le support bois, refixer la couche picturale, reprise de la tension, etc.
- La restauration esthétique : consiste à assainir la couche picturale, par le biais du retrait des matériaux exogènes à l’œuvre qui peuvent en altérer la lisibilité. Le retrait d’un vernis oxydé (jauni), des dépôts comme la crasse, la suie voire les excréments d’oiseaux ou de mouches afin de se rapprocher au mieux des couleurs d’origine en prenant compte de la patine du temps. Il s’agit également de combler les lacunes de matière picturale en retouchant selon différentes techniques.
- La conservation préventive : prévenir de nouvelles altérations en posant par exemple des dos protecteur pour éviter les dépôts de poussière au revers des toiles, la fixation des clés au châssis de manière à éviter leur chute entre la toile et les traverses, un système d’accrochage sécure et enfin quelques conseils en matière d’hygrométrie, de température, d’éclairage, de stockage, transport, etc.
La conservation-restauration allie curiosité scientifique, sensibilité artistique et sens de la matière, tout en ayant les mains au cœur des matériaux (pigments, liants, supports, etc.).
Le vrai sens du métier de conservateur-restaurateur est de préserver et de permettre la transmission de témoignages d’autres avant nous, et ainsi concourir avec humilité à la pérennisation de la connaissance et de la culture. C’est sur ce principe primordial que le travail au sein de l’atelier s’appuie.
Quels matériaux utilisez-vous? Comment et où vous les procurez-vous?
Chaque tableau étant différent, les produits utilisés peuvent varier et sont tous sélectionnés après avoir effectué des tests.
Tous les produits que nous utilisons sont réversibles comme le demande la déontologie du métier afin de faciliter le travail des futurs restaurateurs sachant que les matériaux exogènes apportés sur une œuvre vont vieillir et s’altérer de manière différente que les matériaux d’origine.
Nous utilisons des produits naturels (colle de peau, de poisson, d’amidon) et synthétiques selon les matériaux constitutifs du tableau et son futur lieu d’accrochage, quelques papiers indispensables siliconés ou non, et enfin pour la retouche une peinture réversible destinée à la restauration qui se rapproche au mieux de l’indice de réfraction de la peinture à l’huile.
Décrivez les techniques, les outils et les matériaux que vous utilisez dans votre travail.
Nous favorisons l’intervention minimale à savoir que nous n’intervenons que si le tableau en a besoin. Les interventions se font les plus légères possibles tant pour la conservation du support que pour la partie esthétique.
Notre gamme d’outils est très variée allant des ustensiles communs comme des marteaux, pinces, tournevis aux outils ménagers comme des fers à repasser de trois à cinq kilos, des verres doseurs en passant par les outils de précisions comme des scalpels, des micro pinces, des lunettes loupe et des outils de dentisterie sans oublier les balances de précisions, des solvants organiques neutres, du coton et enfin un éventail infini de pinceaux.
Quel est le profil type de votre clientèle ?
Notre clientèle est très variée : des musées, communes, châteaux, particuliers, collectionneurs, marchands etc.
A quel âge et dans quelles circonstances avez-vous commencé ce métier ?
Passionnée depuis toujours par le monde artistique, j’ai pris des cours de dessin et de peinture depuis l’enfance. Mon goût pour la restauration de tableaux m’a conduite à faire une licence d’histoire de l’art et d’archéologie tout en prenant en parallèle des cours de copie de tableaux. Une formation professionnalisante aboutissant sur un diplôme de Restauration-Conservation de tableaux et d’objets d’art polychromes reconnu par l’État (niveau II – L3 – M1, code 342V), formation où j’ai rencontrée Sophie de Joussineau, qui était en reconversion professionnelle après une carrière dans le monde de l’antiquité en particulier du mobilier.
Après l’obtention de notre diplôme, notre bonne entente, le fait de partager la même vision de ce métier passionnant, la complémentarité instinctive des gestes à accomplir sur une œuvre d’art et enfin notre admiration mutuelle nous a tout de suite conduit à monter notre atelier ensemble. En outre, notre différence d’âge induit des expériences de vie variées enrichit nos points de vue et l’approche sur les œuvres au quotidien.
Où et combien de temps avez-vous été formé avant d’être prêt à créer votre entreprise ? Dans un institut de formation, auprès d’un artisan ou les deux ? Quelle est d’après vous, aujourd’hui, la meilleure façon d’apprendre votre métier ? Ecoles, formations chez l’artisans…
Sophie et moi-même avons été formées à l’ATPFormation à Paris qui sous tend de nombreux stages en atelier qui viennent appuyer la théorie et la pratique de l’institut de formation, ils s’avèrent indispensables pour acquérir un minimum d’expérience et se former l’œil. Les stages permettent également de pratiquer sur un panel d’œuvres important et auprès de professionnels aux parcours variés.
Une vraie formation en école est primordiale pour asseoir ses connaissances en particulier l’aspect physico-chimique d’une œuvre : la nature des matériaux qui la composent et ceux qui seront utilisés pour sa restauration (colles, papiers, solvants, vernis, etc).
Quel rôle jouent le « talent » et la « créativité » dans votre profession ?
Pour exercer ce métier, une sensibilité artistique est indispensable en revanche, il s’agit d’une profession technique et non créative. Le restaurateur ne doit rien créer mais respecter dans son intégrité l’œuvre de l’artiste.
Et qu’en est-il de l’innovation, quels sont les changements depuis vos débuts ? Utilisez-vous de nouveaux matériaux, outils, ou procédés dans la fabrication, le marketing et la commercialisation ? Quel est l’impact de l’innovation sur vos performances ? Comment votre profession pourrait-elle être encore plus innovante ?
Notre métier comportant un aspect scientifique prégnant, nous évoluons au rythme de la science. Beaucoup de recherches sont menées pour alléger les traitements et rendre les matériaux de plus en plus efficaces et réversibles. Nous suivons donc l’évolution scientifique dans ce domaine par le biais de workshop et de lectures.
L’aspect digital de la communication sur notre métier est extrêmement important pour se faire connaitre et partager nos expériences avec d’autres professionnels de la restauration à l’international.
Quelle est la meilleure façon d’apprendre votre métier?
Une formation diplômante accompagnée de stages variés et nombreux.
Quel est votre message aux jeunes générations qui pourraient choisir votre profession ?
N’ayez pas peur de vous lancer dans l’artisanat et dans ce métier passionnant où chaque jour apporte une découverte, une remise en question et d’immenses satisfactions. La clé de la réussite est dans la curiosité, le travail, la motivation, le partage et l’humilité. Foncez et vivez vos rêves, vous ne le regretterez pas !